Esquive – N°10 – Décembre 2013

Esquive - 10 - Décembre 2013

Esquive – N°10

Esquive aime bien l’histoire.

Elle y puise de l’inspiration. Elle y trouve un peu de baume contre le fatalisme en se souvenant de la détermination et du courage des révoltés du passé. À la mémoire officielle et bien pensante des vainqueurs, elle oppose le souvenir de celles et ceux qui ont osé défier l’ordre établi. Ceux qu’on enterre deux fois en les reléguant dans les poubelles humiliantes de l’Histoire après les avoir assassinés, comme Skander Vogt. En les oubliant avec soin, comme les grévistes de 1898. En faisant d’eux des dégénérés, comme Luccheni. Ignorés, ces opprimés ont aussi en commun d’avoir eu affaire à la maison poulaga. Esquive en parle beaucoup, des cognes. Et ça a peu de chance de s’arrêter, dans une Genève qui se peint en bleu.

Une République policière. C’est un peu le constat que tire Esquive de l’histoire locale récente. Face à l’inexistence de mouvements sociaux, à la vacuité des discours gauchistes, aux situations toujours plus précaires de ceux dont il est toujours facile de faire des boucs émissaires, la flicaille genevoise ne connaît pas de crise.

Considérer uniquement la police comme le bras armé de l’État est illusoire et dangereux. Comme une mafia, elle étend ses tentacules dans le canton. Mais nul besoin pour elle d’être insidieuse. Avec la bénédiction et le soutien des médias, des partis politiques et de la justice, elle a aujourd’hui le principal syndicat combatif, le seul en tout cas à pouvoir imposer ses revendications.

La flicaille a également le deuxième parti au Grand Conseil genevois, transformé en un grand poulailler où les coqs du MCG se pavanent en revendiquant fièrement leur képi. Et depuis quelques années, la police est devenue l’un des principaux rédacteurs de la presse cantonale qui reprend tels quels ses communiqués, jours après jours. Décomplexée et plus forte que jamais, elle s’est imposée comme la seule réponse aux soi-disant problèmes de sécurité, qu’elle crée et entretient.

Alors Esquive fait le dos rond, puisque les jours meilleurs, sans parler du Grand Soir, semblent s’être évanouis de l’horizon. Mais elle continuera ses parades, en gardant à l’esprit qu’après l’esquive vient la riposte.

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