Esquive – N°5.8% – Novembre 2014

Esquive - 5.8% - Juin 2014

Esquive – 5.8%

Logement à Genève: la gestion par la crise

La crise du logement à Genève semble parfois aussi vieille que la destruction de ses fortifications. Qui se souvient encore de l’époque où l’on pouvait passer un mois sans se faire rabattre les oreilles par l’urgence catastrophique de la situation? Qui peut encore croire aujourd’hui qu’elle représente autre chose qu’un mode de gouvernance?

La définition statistique de la crise du logement est basée sur le taux de vacance des habitations, c’est-à-dire sur le nombre de logements disponibles en attente de locataires ou d’occupation par leur propriétaire. Derrière cette définition se cache une technique de gestion voulue et contrôlée par ceux qui en proftent. D’abord, parce que “la crise” permet aux propriétaires et aux régies d’engranger des bénéfices indécents depuis des décennies. Ils profitent d’un rapport de force incomparable.En faisant peser sur les locataires la peur de perdre leur appartement, et aux nouveaux habitants la chance qu’ils ont d’avoir trouvé où se loger.

Ensuite, parce qu’ils ont toujours beau jeu de se poser en victime de lois limitant les constructions ou un tant soit peu leur soif de profit: ces zones agricoles qu’on leur empêche de déclasser, ces quartiers déjà extrêmement densifiés où on les empêche de surélever leurs immeubles, ces logements sociaux qu’on leur impose dans leurs nouveaux bâtiments.

La puissance politique des milieux immobiliers n’a comme seule concurrente celle des policiers. Mais les propriétaires sont beaucoup plus riches. Ils peuvent placer à l’envi leurs créatures au Conseil d’Etat, comme Mark Müller, ou au poste de Procureur général, comme Zappelli.
Ainsi, lorsqu’il a été décidé que les squats étaient des résidus d’un passé suranné, ce dernier est arrivé à point nommé pour finir de les décimer. C’est jusque dans le langage que leur influence est sensible, quand le mot spéculation a aujourd’hui disparu des pages des journaux et des bouches politiciennes. En même temps que sa pratique, voudrait-on nous le faire croire.

La crise n’a rien d’exceptionnelle, qu’elle soit du logement ou économique, locale ou mondiale, elle n’est qu’un levier politique que les crapules de ce monde ne se lassent pas d’activer. Et, très visiblement, c’est pas nous qui y gagnons.

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Esquive – N°¾ – Juin 2014

Esquive - ¾ - Juin 2014

Esquive – ¾

UN NUMÉRO SANS VRAI ÉDITORIAL (mais avec plein d’autres choses)

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Esquive – N°77 – Mars 2014

Esquive - 77 - Mars 2014

Esquive – N°77

ÉDITORIAL (antidémocratique, léger, rafraîchissant)
Le vendredi 14 février 2014 vers 22 heures, 600 personnes ont défilé entre la Place des Volontaires et les Pâquis derrière le slogan “Les seuls étrangers dans nos quartiers sont les flics et les fachos”. Sans autorisation, ce qui est plutôt rare, et sans se faire gazer, ce qui l’est encore plus.
Les jours suivants, Esquive s’est bien marrée en découvrant dans la presse les commentaires indignés contre ces jeunes dont la violence (des tags, ndlr) n’avait rien de démocratique. Ceux-là n’ont sûrement même pas saisi leur immense chance d’exprimer leur opinion dans l’urinoir (l’isoloir, ndlr). Mais maintenant, c’est trop tard. La plus grande imposture de l’histoire, le Peuple souverain, a tranché.
Comme les imbéciles ont déjà leur Tribune (de Genève, ndlr), Esquive a fait son micro trottoir. Et, visiblement, ça va être dur de trouver un conscensus…

Et vous, qu’est-ce que vous pensez de la démocratie?

La démocratie, ça pue. La démocratie, ça a mauvaise odeur. La démocratie, ça dégage. La démocratie, ça emboucane. La démocratie, ça empeste. La démocratie, ça empoisonne. La démocratie, ça empuante. La démocratie, ça exhale. La démocratie, ça fouette. La démocratie, ça infecte. La démocratie, ça poque. La démocratie, ça prend à la gorge. La démocratie, ça schlingue. La démocratie, ça sent comme une friteuse qui brûle au soleil. La démocratie, ça trouillote. La démocratie, ça tue même pas les mouches.

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Esquive – N°10 – Décembre 2013

Esquive - 10 - Décembre 2013

Esquive – N°10

Esquive aime bien l’histoire.

Elle y puise de l’inspiration. Elle y trouve un peu de baume contre le fatalisme en se souvenant de la détermination et du courage des révoltés du passé. À la mémoire officielle et bien pensante des vainqueurs, elle oppose le souvenir de celles et ceux qui ont osé défier l’ordre établi. Ceux qu’on enterre deux fois en les reléguant dans les poubelles humiliantes de l’Histoire après les avoir assassinés, comme Skander Vogt. En les oubliant avec soin, comme les grévistes de 1898. En faisant d’eux des dégénérés, comme Luccheni. Ignorés, ces opprimés ont aussi en commun d’avoir eu affaire à la maison poulaga. Esquive en parle beaucoup, des cognes. Et ça a peu de chance de s’arrêter, dans une Genève qui se peint en bleu.

Une République policière. C’est un peu le constat que tire Esquive de l’histoire locale récente. Face à l’inexistence de mouvements sociaux, à la vacuité des discours gauchistes, aux situations toujours plus précaires de ceux dont il est toujours facile de faire des boucs émissaires, la flicaille genevoise ne connaît pas de crise.

Considérer uniquement la police comme le bras armé de l’État est illusoire et dangereux. Comme une mafia, elle étend ses tentacules dans le canton. Mais nul besoin pour elle d’être insidieuse. Avec la bénédiction et le soutien des médias, des partis politiques et de la justice, elle a aujourd’hui le principal syndicat combatif, le seul en tout cas à pouvoir imposer ses revendications.

La flicaille a également le deuxième parti au Grand Conseil genevois, transformé en un grand poulailler où les coqs du MCG se pavanent en revendiquant fièrement leur képi. Et depuis quelques années, la police est devenue l’un des principaux rédacteurs de la presse cantonale qui reprend tels quels ses communiqués, jours après jours. Décomplexée et plus forte que jamais, elle s’est imposée comme la seule réponse aux soi-disant problèmes de sécurité, qu’elle crée et entretient.

Alors Esquive fait le dos rond, puisque les jours meilleurs, sans parler du Grand Soir, semblent s’être évanouis de l’horizon. Mais elle continuera ses parades, en gardant à l’esprit qu’après l’esquive vient la riposte.

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Esquive – Hors-série – Août 2013

Esquive - Hors-série - Août 2013

UMÜT KIRAN
10.09.1991 – 18.04.2010
ASSASSINÉ PAR LA POLICE

Dans le dernier numéro d’Esquive, nous vous parlions d’un jeune qui s’était fait tirer dessus par la police lors d’une descente chez lui, dans le quartier des Acacias à Genève. Il ne s’agit pas d’un cas isolé. En Suisse romande, les crimes policiers se multiplient d’année en année, causant parfois la mort d’individus qui ont le point commun de ne pas avoir des ennuis pour délinquance fiscale.

En 2010, la police cantonale vaudoise s’est rendue coupable de deux assassinats en moins de deux mois. « Il peut crever, ça fait 50 minutes qu’il respire la fumée » disait un maton au téléphone à son collègue policier, qui lui à répondu « ça lui fait du bien, [à ce] connard ».

Et ben il est mort, Skander Vogt, enfermé depuis 10 ans alors qu’il était condamné à vingt mois. Et lorsqu’un mois plus tard, un agent de la même police tire sept balles au fusil mitrailleur sur une voiture volée tuant Umüt – 18 ans – d’une balle dans la tête, on se dit qu’ils le font exprès. Un non-lieu a été prononcé en première instance par les tribunaux de Lausanne et de Fribourg pour les plaintes déposées par les familles des morts.

Erdal, le frère d’Umüt, et Yunus sont aujourd’hui accusés de mis en danger de la vie d’autrui.

Lorsque la police assassine, la justice acquitte les assassins. Et elle ne se gène pas pour attaquer les proches des victimes.

On nous dit que policier est un métier difficile et dangereux. Mais rappelons que le dernier flic vaudois mort dans l’exercice de ses fonctions s’est pris une balle d’un collègue lors d’un entrainement en 2002. Qu’ils s’entretuent s’ils le veulent mais qu’ils laissent les autres en paix.

C’est en souvenir d’Umüt, pour soutenir Erdal, Yunus et tous les autres que ces pages ont été rédigées

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Affiche Erdal Yunus

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Esquive – N°100 – Juin 2013

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Esquive – N°100

Le lundi 15 avril aux Accacias, des policiers cagoulés font irruption chez un petit revendeur d’herbe et lui tirent une balle dans le ventre alors qu’il n’est pas armé. Deux semaines plus tard à la Servette, des flics se trompent de porte lors d’une perquisition et font irruption dans l’appartement d’une famille.

Personne n’est à l’abri de voir des pandores cagoulés et armés jusqu’aux dents débarquer chez soi et de se faire plaquer au sol avec violence.
Personne? Esquive n’en est pas si sûre. Avez-vous déjà entendu parler de flics qui se trompent de porte lorsqu’ils font une descente à Cologny? En vérité, c’est toujours les mêmes qui subissent les bavures. C’est aussi toujours les mêmes qui finissent à Champ-Dollon. Peut-être est-ce la sécurité des riches qui fait l’insécurité des pauvres.

La Brigade anti-criminalité (BAC) genevoise a arrêté 523 personnes depuis sa création en avril 2012, principalement des Maghrébins. Cette brigade, inspirée de la BAC française, est connue pour son comportement semblable à celui d’une bande. Source d’insécurité majeure dans certains quartiers, elle cible ceux qui n’ont pas la bonne couleur de peau et pas le bon statut social. Car à l’inverse, tous les riches ont toujours été les bienvenus à Genève.

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Des énergumènes partent à l’assaut du ciel

On parle beaucoup du 9 novembre 1932. La gauche dénonce chaque année les agissements de l’armée Suisse lors de cet événement mais tait délibérément la force que représentait la classe ouvrière Genevoise de cette époque. Force incontrôlable que le Parti Socialiste de l’époque espérait soumettre. Le 22 Août 1927 le jour de l’exécution de Sacco et Vanzetti*, une manifestation est appelée au palais électoral à Plainpalais, bâtiment où se trouve actuellement l’Uni Dufour. A cause du mauvais temps, la manifestation dû se faire à l’intérieur mais les 10’000 places que comptait cette salle n’ont pas suffi à abriter les 20’000 personnes présentes. Le rassemblement occupe ainsi également la Place-de-Neuve.

Des discours enflammés

Des discours de Luigi Bertoni et Léon Nicole ont lieu, ils dénoncent une justice de classe et argumentent sur l’innocence des accusés qui démontrent qu’ils sont condamnés pour leurs idées et non pas pour leur actes ce qui fait de cette exécution une attaque contre la classe ouvrière mondiale. Vers 19h30 la manifestation officielle est terminée et plusieurs milliers de personnes se dirigent vers le consulat américain à la rue Petitot. La foule est bloquée par des cordes au boulevard du Théâtre, 160 policiers défendent le consulat des Etats-Unis. Quelques minutes plus tard une « formidable poussée » tente d’enfoncer le barrage mais une double haie de gendarmes la repousse. La foule réagit en sifflant, en criant « mort aux vaches » et par des jets de pierres. La police charge et arrête 6 personnes dont une femme qui, armée de son parapluie, frappait avec beaucoup de conviction les policiers. C’est à ce moment que des manifestants repèrent le sous-brigadier Corsat qui se distingue des autres policiers par son extrême brutalité.

Initiative prolétarienne.

Initiative prolétarienne.

Perte de contrôle

Léon Nicole négocie la libération des personnes arrêtées en échange d’une dispersion de la manifestation qu’il croit contrôler. La foule retourne sur la Place-de-Neuve. Lorsque les manifestants libérés les rejoignent Nicole annonce la dissolution de la manifestation et invite les manifestants à respecter les arrangements négociés avec la police en rentrant chez eux. C’était sans compter la prise de parole de Lucien Tronchet jeune anarchiste « Camarades ! Nos amis, que l’on vient de remettre en liberté ont été lâchement frappés par les agents, nous ne devons pas nous laisser assassiner par la police au service du capitalisme. Je vous invite à retourner au consulat des Etats-Unis et à agir avec la police comme elle a agi avec nous. »*. Un cortège de 2’000 personnes se forme, il descend la rue de la Corraterie et s’engouffre dans la rue de la Confédération. Des vitres sont brisées au Cinema Etoile, au Colisée et au Bar Américain. Lorsqu’elle traverse le pont des Bergues la foule grossit à vue d’oeil pendant que plusieurs voitures sont endommagées. La manifestation remonte jusqu’à la place des Alpes ou le bar Maxim est saccagé. C’est à ce moment que l’on retrouve l’agent Corsat qui tente avec un autre agent d’arrêter un des émeutiers, les agents sont encerclés par la foule, Corsat se prend un cou à la tête qui lui déchire le cuir chevelu sur plusieurs centimètres tandis que l’autre agent se fait frapper à la tête et voler son revolver. La cohue prend ensuite la rue Chantepoulet, où le cinema central est saccagé, pour se rendre à la place des 22 cantons ou des taxis bondés d’agents de sûreté arrivent et arrêtent une personne. Les policiers tirent soi-disant en l’air mais un manifestant membre du parti socialiste est mortellement touché.

Des grèles de cailloux

Ce soir là, vers 22h 30 il y avait peu de monde au poste de police de la rue Necker lorsque une bande de 4 à 500 « énergumènes » débarquent. Une grêle de cailloux détruit toutes les vitres du bâtiment. Dans un moment de calme les manifestants réclament la libération de leurs camarades qui leur est promise par un agent. Mais l’arrivée de renforts interrompt les négociations, les agents tirent en l’air et arrêtent plusieurs manifestants. La foule se réfugie dans les rues adjacentes ou les pompiers viennent l’arroser. La police ayant quitté le consulat pour venir en aide à leurs collègues ailleurs dans la ville, c’est avec intelligence qu’un groupe de manifestants y retourne et détruit toutes ses vitres. Un autre groupe se rend à la Société des Nations, à l’emplacement de l’actuel hôtel président Wilson, et y détruit toutes les vitres, glaces et lustres. On parlera de 50’000 frs de dégâts rien qu’à cet endroit**. Ensuite, la foule brise les vitres de l’hôtel Bellevue, du garage américain à la rues de l’ancien port et celles d’une agence de voyage américaine. Pour finir le magasin Walk-Over est pillé et des chaussures sont jetées au lac. Plus de 1500 personnes restent jusqu’à minuit devant l’hôtel des Bergues où ils se font disperser.

Illustration parue la semaine suivant les émeutes dans le Réveil.

Illustration parue la semaine suivant les émeutes dans le Réveil.

Un lendemain pluvieux

Mardi matin la garde civique est appelée en renfort et la mise de piquet du régiment Genevois est ordonné. Tous les rassemblements sont interdits en ville. Lucien Tronchet avait appelé à se rassembler dès 14 h devant le consulat américain mais peu de gens sont présent au rendez-vous, certainement à cause du mauvais temps. En fin d’après midi, des gens commencent tout de même à se rassembler aux alentours du consulat. Vers 18h la garde civique charge très violemment les manifestants qui n’ont pas voulu se disperser malgré les sommations et frappe au passage des passants.

Un Mouvement ouvrier divisée

Ces événements divisent évidemment la gauche. Dès le lendemain le Travail, organe du parti socialiste, dont le rédacteur en chef est Léon Nicole, se distancie des émeutiers « des jeunes gens parfaitement inconnus dans les milieux ouvriers » et déclare « Les actes qui se sont produits après le licenciement de la place-neuve portent préjudice au mouvement ouvrier de notre ville (…) Nous sommes contre les émeutiers et contre les professionnels de l’émeute ». Il est intéressant de remarquer qu’il ignore complètement le discours de Lucien Tronchet à la place-neuve, relayé par La Suisse que personne n’a démenti. Il évite ainsi de critiquer les anarchistes ou des organisations de gauche en présentant les émeutiers comme des fauteurs de troubles extérieurs au mouvement et extrêmement jeunes. Seulement, comme le dit le drapeau rouge, organe du parti communiste « si c’est principalement des jeunes qui ont lancé des pierres, ils n’ont pu le faire qu’avec l’encouragement de la foule qui à aucun moment n’a essayé de les arrêter. ». On lit d’ailleurs dans le même journal qu’au 26 août parmi les 19 détenus jugés, 7 ont plus de 30 ans et 7 ont plus de 20 ans et la majorité sont des ouvriers. Le réveil lui parle d’une « protestation naturelle devant le consulat américain et puis de quelques bagarres et vitres cassées», il minimise les faits « rien d’irréparable en somme », défend les émeutiers mais ne semble pour autant pas être en total accord avec eux « Le manque même chez la masse ouvrière d’une véritable éducation à l’action fait que celle-ci, due à une passion subite, à une explosion occasionnelle, n’est pas toujours exactement ce que nous voulons, mais une fois pour toutes, ne cherchons plus la moindre justification ou excuse en face d’un ennemi qui se croit tout permis et le prouve jour après jour. ». Le réveil ne semble pas partager la position de Lucien Tronchet dont le discours aurait déchaîné la foule. Ces trois organes médiatiques du mouvement ouvrier tirent des conclusions très différentes des cette journée. Les socialistes veulent le renforcement de la police qui défendra la classe ouvrière lorsque ses représentants seront au pouvoir. Le parti communiste réclame la formation d’une garde ouvrière qui aurait la tâche de défendre la classe ouvrière contre la garde civique et les excès de la police. Le Réveil quant à lui déclare « nous nous refusons à vouloir brimer les foules », on imagine bien à quoi pourrait servir une garde ouvrière lorsque les intérêts parti communiste auront évolué.

Une presse bourgeoise qui ment

Selon la presse bourgeoise Léon Nicole est en grande partie responsable des événements du 22. C’est ses discours enflammés qui auraient motivé ces « énergumènes » à partir à l’assaut de la ville. Selon cette même presse des coups de feu auraient été tirés par des manifestants. La Suisse raconte ainsi la mort de Schaeffer. : « Lorsque le cortège arrive à la place des 22 cantons des coups de feu partent des rangs du cortège, un homme s’affaisse touché mortellement. … Quelques énergumènes ne manquèrent pas d’accuser la police, or aucun agent, aucun gendarme ne se trouvait aux environs du coup de feu». Quelques jours plus tard ils confirment leurs propos en affirmant « L’arrestation de cet énigmatique personnage vêtu d’un manteau blanchâtre serré par une ceinture de cuire nous apprendrait bien des choses car il tint le premier rôle dans le drame qui ensanglanta la soirée. (…) Le mystérieux personnage n’avait aucune raison de tuer un manifestant. Il ne destinait pas non plus le projectile à un représentant de la police : il n’y en avait aucun dans les environs. Il ne reste donc qu’une hypothèse : l’homme au manteau blanc, usant d’une méthode assez usitée dans les manifestations de ce genre, n’avait pour but sans doute, en lâchant un coup de feu, que de provoquer une bagarre qui eu donné à l’émeute la forme que les meneurs de cette sorte désirent voir prendre à toutes celles dont ils prennent la direction. Car l’individu en question dirigea toutes les « opérations », le fait est établi péremptoirement. On croit au reste qu’il était venu de Paris avec cette mission bien déterminée. » Le Journal de Genève présente quant à lui cette version « Bloqués devant leur poste saccagé les gendarmes furent obligés de tirer en l’air pour maintenir les énergumènes en respect. A ce moment des coups de revolver partirent des rangs des manifestants. Un de ceux-ci fut mortellement blessé. D’après l’enquête faite immédiatement, on a acquis la certitude que le coup de revolver a été tiré par un manifestant vêtu d’une blouse. » Les deux journaux racontent qu’un revolver au chargeur plein aurait été trouvé par terre après la manifestation. A ma connaissance aucune enquête sérieuse n’a été rendue publique à ce jour concernant ces coups de feu parti des rangs des manifestants, mais ce qui est sûr c’est qu’ils ne sont pas mentionnés dans un article traitant du sujet dans les histoire militaire genevoise. A croire que même les historiens militaristes n’y croient pas. Peut-être ont-ils eu peur ces médias bourgeois qui ont même cité l’incontournable Lénine au lendemain de l’émeute « La révolution, braves crétins des salles de rédaction bourgeoise, vous tombera sur les reins au moment où vous vous y attendrez le moins. »

Des mesures sérieuses

Les autorités ne s’attendaient pas à une telle manifestation ce jour-là, elles s’imaginaient plutôt qu’elle auraient eu lieu le lendemain. Dans son rapport M. Zoller, chef de la police, explique que les émeutiers étaient très mobiles alors que la police ne l’était pas du tout, elle avait toujours un temps de retard sur eux. Par contre, selon une étude, 800 volontaires se seraient présentés à la mobilisation de la garde civique entre le 23 et le 25 Août, ce qui aurait sérieusement renforcé la police si les émeute avaient continué dans les jours suivants. Cette garde civique provoquera de nombreux débats au grand conseil qui décidera de ne plus avoir recours à ce qui ressemble beaucoup à une milice d’extrême-droite. Le chef de la police profitera de cette émeute pour demander une augmentation des effectifs, notamment des brigades cyclistes, l’achat d’une voiture, de motocyclettes et d’un side-car, la création d’un poste de police proche de la société des nations ainsi que la possibilité d’appeler directement un bataillon de pompiers sans avoir à demander au conseiller administratif responsable. Le 6 mars 1928, les effectifs de police sont augmentés. Le 19 juin 1928, un nouveau poste de police est installé aux Pâquis. Le 8 octobre, l’exécutif municipal confirme que le département militaire a le droit de lever le bataillon des pompiers sans avoir à demander au conseiller administratif. Après les événements du 9 novembre 1932, le journal de Genève mentionne un fausse alerte incendie à Lancy certainement destinée à écarter les pompiers du poste permanent. Dommage que de nos jours les flics aient leur propre matériel hydraulique de répression.

Une police de Gauche?

Il ne s’agit pas de faire de cet événement un culte comme s’il s’agissait de quelque chose d’incroyable. Finalement les dégâts ne sont pas supérieurs à ceux causés par une manif anti-omc et tout est vite rentré dans l’ordre. Ce que je voulais relever par ce texte, c’est le caractère incontrôlable de la classe ouvrière trop souvent laissé de côté par les historiens de gauche. Les temps ont changé, la police est beaucoup plus présente, mieux équipée et beaucoup plus mobile. « Plus jamais ça » déclare la gauche lorsqu’elle commémore la fusillade du 9 novembre 1932. Comme dans le Travail en 1927 elle réclame une police efficace pour réprimer ceux qui ne respectent pas ses consignes. Une police efficace pour qu’on ne doive plus jamais en appeler à l’armée pour réprimer une foule. Une police qui défend toutes les grandes fortunes de la planète qui ont leur compte en Suisse. Qui défend la paix sociale bourgeoise et les droits de l’homme blanc et riche. Peut-être même une police sociale et de Gauche qui discute avant de taper. Seulement, ils peuvent créer toutes les polices qu’ils veulent, le contrôle total des classes dangereuses est impossible et l’ordre bourgeois de Genève n’est pas immuable.

Notes:

*Après la Première Guerre mondiale, on assiste aux Etats-Unis à une forte montée du syndicalisme. Les grèves pour des meilleurs salaires et une réduction du temps de travail donnent lieu à des affrontements violents entre grévistes et forces de l’ordre dans plusieurs grandes villes. C’est dans ce contexte qu’en 1920 les anarchistes immigrés d’origine italienne Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti sont arrêtés pour un braquage puis condamnés à mort malgré un manque de preuves formelles. Une campagne de solidarité internationale est lancée, ce qui fera de cette affaire un symbole de la lutte des classes de cette époque.

**Représente beaucoup d’argent à l’époque.

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“Bonjour, j’aimerais une pillule du lendemain.”

C'est pourtant pas compliqué.

C’est pourtant pas compliqué.

La phrase est finie; la demande est claire. Pas de raison que cela prenne une autre tournure que pour une boîte de Dafalgan. Pourtant, la réponse la plus fréquente dans les innombrables pharmacies de Genève n’est pas: « Ça vous coûtera 24.50 francs, s’il vous plaît », mais une injonction à passer à l’arrière de la pharmacie pour répondre à des questions ultrapersonnelles posées par un pharmacien au ton paternalisant et culpabilisateur.

On les emmerde. Et à la question: « Vous avez eu un rapport sexuel non-protégé, mademoiselle? », on leur répondra: « Non, un accident de voiture, enfoiré » et on ira en France voisine, où le prix comme l’accueil sont moins invasifs

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Police partout, Police partout

Un flic pour 250 habitants:l’objectif visé par l’ensemble de la classe politique genevoise semble en voie d’être atteint.

C’est le résultat d’une augmentation des effectifs qui s’accélère depuis 2009 et qui est soutenue par une campagne alarmiste et sécuritaire. Avec 1’800 policiers dans le canton, 340 garde-frontières, 124 policiers municipaux en ville de Genève et une centaine d’autres dans l’ensemble des communes, la présence de l’ordre en uniforme ou en civil se fait de plus en plus oppressante.

La police, on s'en passerait bien.

La police, on connaît la musique et on s’en passerait bien.

À cette présence policière massive, il faut ajouter la cinquantaine de sociétés privées qui profitent de la vague sécuritaire. En plus de la surveillance pour le compte de particuliers, ces agences sont mandatées par l’Etat et les communes qui sous-traitent une partie de leurs tâches: la protection des sites diplomatiques mais également, et de plus en plus, la surveillance des rues et des prisons.

L'uniforme change, la fonction demeure identique.

L’uniforme change, la fonction demeure identique.

Maudet et consort voudraient nous faire croire, avec leur discours populiste et mensonger, que Genève est en retard sur le plan de la sécurité quand, en fait, cette ville est l’une des plus fliquées d’Europe:

  • Augmentation de 200 policiers cantonaux entre 2009 et 2011, et 250 prévus pour 2015,
  • Augmentation de 21 policiers municipaux pour un total de 124 en Ville de Genève,
  • Augmentation de 48 gardes frontières pour un total de 386,
  • Soit plus de 2500 flics publics dans le Canton de Genève

À Genève, il y a 1 flic pour 258 habitants alors qu’à Zurich il y a un flic pour 363 habitants et que la moyenne suisse est de 1 flic pour 500 habitants. Quant à Marseille, les chiffes parlent de 1 flic pour 300 habitants.

L’augmentation des effectifs ne reflète ni celle de la population ni celle du nombre de délits; il suffit de lire le rapport d’activités de la police pour s’en rendre compte. Ces statistiques sont parlantes car elles dénoncent l’hypocrisie du discours sécuritaire. Mais au delà des chiffres (toujours manipulables), cette hystérie sécuritaire est le fruit d’une volonté politique.

Un apéro entre amis.

Un apéro entre amis.

Qu’il y ait une augmentation ou une baisse de la criminalité, la presse et tous les partis politiques continuent leur propagande sécuritaire immonde: celle de la solution policière à tous nos problèmes, celle du contrôle et de la peur, celle de la délation et de la menace.

S’ils misent autant sur la force et la  peur, c’est parce qu’ils en ont besoin pour mener à bien leur objectif. Ils veulent maintenir une ville pour banquiers et in- vestisseurs, une ville où l’argent pillé aux quatre coins de la planète puisse être en sécurité. Ils sou- haitent cultiver une image bien propre, bien suisse, symbole de paix, en cachant à tous prix les pauvres, les mendiants, les voleurs, les étrangers et ceux qui critiquent d’une manière ou d’une autre ce système qui nous broie.

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ESQUIVE – N°99 – Février 2013

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Que fleurissent les perce-merde!

Dans la grande famille du règne végétal, il existe une petite fleur mystérieuse: la perce-merde. Peu répandue en Suisse, même si elle a pointé son nez à Genève dans les années 30, elle est présente partout sur terre. Sa minuscule graine est aussi résistante qu’un spore. Elle survivrait à un voyage dans l’espace. Mais, c’est dans la merde – indispensable à son développement – qu’elle se sent le mieux. Lorsqu’elle germe, si la couche de merde est trop résistante, elle peut discrètement étendre ses racines sous terre pendant des années. À la différence des autres plantes, elle n’a pas besoin de soleil pour croître, car elle se nourrit uniquement de merde.

Quand la matière fécale est pourrie à point, la perce-merde peut soudain la traverser et apparaître au grand jour. Dès son éclosion, elle résiste à toutes les attaques, même à celles d’un fameux herbicide dont nous tairons le nom afin de ne pas faire de publicité à nos ennemis. Elle a tendance à lancer sa tige à l’assaut du ciel sans consolider sa base. Et dans cet élan souvent fatal, alors que ses pétales sont plus beaux que jamais, elle dissémine à tout va. Jusqu’à la disparition de toute merde.

Esquive aimerait favoriser la multiplication des ces magnifiques fleurs en analysant subjectivement la merde dans laquelle nous baignons. Consciente qu’un journal ne fera pas disparaître les étrons, son but est de montrer qu’on peut esquiver la merde, la combattre et qu’elle peut parfois reculer.

Télécharger le PDF du numéro 99 d’Esquive, le journal qui attend son heure.

 

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